Interview de Me NOEL paru dans Miroir Social le 22 septembre 2009.
Bouffée d’oxygène pour certaines entreprises, alternative probable aux licenciements économiques… Le chômage partiel n’en est pas moins contraignant, enfermé dans une procédure stricte.
Avec 319 000 personnes au chômage partiel au second trimestre 2009, le dispositif semble faire des émules. Il est vrai que l’administration a su donner les coups de pouce opportuns en ces temps troublés. Dernier en date : l’augmentation du contingent annuel d’heures indemnisables au titre de l’allocation spécifique de chômage partiel porté, par arrêté du 2 septembre 2009. Il passe de 800 à 1 000 heures.
Pas automatique
La formule a de quoi séduire. Pour autant, elle n’est ni indolore ni automatique. Déjà en matière de procédure à suivre. Avant d’envoyer son dossier par lettre recommandée avec avis de réception à la DDTEFP, l’entreprise a déjà utilisé les différentes alternatives à sa disposition, « comme la prise imposée des RTT et des congés payés ou la renégociation de son accord RTT », évoque Marion Ayadi, associée du cabinet d’avocats Raphaël. Elle s’est au préalable assurée que sa demande était justifiée. Autrement dit : l’entreprise est réellement confrontée à des difficultés provisoires et exceptionnelles. Enfin, elle a également consulté son CE (à défaut, des délégués du personnel) « toujours très circonspects face à des discours relatant les difficultés de l’entreprise », note Christophe Noël, avocat au barreau de Paris.
Reste à convaincre l’administration à grand renfort de pièces comptables, tableaux financiers… En la matière, l’instruction DGEFP du 25 mars dernier est très claire : l’entreprise doit faire état des motifs justifiant le recours au chômage partiel, la durée prévisible de la sous-activité, le nombre de salariés concernés, ainsi que, pour chacun d’eux, la durée du travail habituellement effectuée.
« L’entreprise a le choix entre deux formules : le chômage partiel classique, qui équivaut à une réduction de l’horaire habituel de travail pratiqué dans l’établissement en deçà de la durée légale (ou de la durée conventionnelle si elle est inférieure) ou à la fermeture temporaire de l’entreprise, et qui, s’il se prolonge au-delà de six semaines, se transforme en chômage partiel total ; et le petit dernier né avec la crise, l’activité partielle de longue durée qui permet une indemnisation plus longue et plus élevée égale à 75 % du salaire brut (contre 60 %). En retour, l’entreprise s’engage à ne pas licencier pendant une période équivalente à deux fois la durée de la convention signée », explique Me Ayadi. Si malgré tout, elle le fait, elle devra rembourser les aides publiques.
Quoi qu’il en soit, elle doit avancer les preuves de sa bonne foi : l’état de ses carnets de commande, la perte de contrats… « Toutes les précautions sont prises. Logique, le chômage partiel fait appel aux deniers publics », souligne Me Noël. En effet, même si le paiement des allocations incombe à l’employeur, il n’en fait que l’avance. L’État en remboursant la majeure partie. « En cas de chômage partiel total, c’est-à-dire lorsque le chômage partiel excède six semaines consécutives, Pôle Emploi prend le relais ; le salarié perçoit alors les allocations chômage », informe Isabelle Ayache-Revah associée du cabinet d’avocats Raphaël.
Verdict après 20 jours d’instruction
Après 20 jours d’instruction, l’administration rend son verdict. « Lorsque le chômage partiel est admis, les salariés voient leur contrat de travail suspendu et non rompu », signale Christophe Noël. En clair : ils ne peuvent pas refuser ce qui les attend (voir article sur le refus du chômage partiel). « Exception faite des salariés protégés pour lesquels aucun changement de leurs conditions de travail ne peut leur être imposé sans leur accord », précise Me Ayache-Revah. À charge ensuite pour l’employeur qui va diminuer la durée de travail d’informer sur les nouveaux horaires de travail l’inspecteur du travail et évidemment les salariés par voie d’affichage et/ou individuellement. Les salariés faisant l’objet d’une procédure de licenciement économique ne sont jamais concernés par un dispositif de chômage partiel.
Enfin, l’affaire sera définitivement sur les rails quand l’entreprise aura bouclé le volet allocation. Les salariés perçoivent donc 60 % de leur salaire brut auxquels s’ajoutent, le cas échéant, une allocation complémentaire prévue dans leur convention collective. Le sujet se corse pour ceux au forfait jour. « Si le chômage partiel se traduit par une baisse des horaires de travail, ils sont exclus du dispositif. En revanche, si l’entreprise ferme ses portes quelques jours ou quelques semaines, ils peuvent en bénéficier, mais l’employeur doit alors utiliser un calcul très complexe pour déterminer l’allocation à leur verser », prévient Marion Ayadi. Sans oublier ceux qui choisissent de suivre une formation, alors ils perçoivent 100 % de leur salaire.